L'énergie du droit - numero 76
Actualité Électricité Gaz
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EN BREF
LES TEXTES | Décret portant modification de la partie réglementaire du code de l'énergie relative aux schémas régionaux de raccordement au réseau des énergies renouvelables Délibération de la CRE du 11 juillet 2024 relative à l’évaluation des charges de service public de l’énergie pour 2025 et à la réévaluation des charges de service public de l’énergie pour 2024 |
LE JUGE | CE : rejet du recours dirigé contre l’approbation par la CRE du modèle de contrat d’accès au réseau public de transport d’électricité définitif pour les nouvelles interconnexions dérogatoires (CART-NID) CE : rejet du recours dirigé contre les délibérations de la CRE portant sur le calcul du complément de prix de l’ARENH (ARENH) CE : rejet du recours dirigé contre la réévaluation des charges de service public de l’énergie pour 2023 par la CRE |
L’EUROPE | Publication du « Paquet gaz » et du Règlement relatif à la réduction des émissions de méthane |
LA REGULATION | CoRDiS : sanction de 6 millions d’euros à l’encontre de la société Ohm énergie pour abus du droit d’ARENH CoRDiS : examen d’une demande de mesures conservatoires relative au raccordement provisoire d’une habitation en cours de construction |
ET AUSSI | Lignes directrices de la CRE pour le renforcement de la protection des consommateurs d’électricité et de gaz naturel |
[Actualités de juillet/août 2024]
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LES TEXTES
Décrets
Décret portant modification de la partie réglementaire du code de l'énergie relative aux schémas régionaux de raccordement au réseau des énergies renouvelables
Le schéma régional de raccordement au réseau des énergies renouvelables (S3REnR) définit les ouvrages à créer ou à renforcer pour le raccordement des installations de production d’électricité renouvelable. Introduit par l’article 29 de la loi du 10 mars 2023 relative à l’accélération de la production d’énergies renouvelables (loi APER), l’article L. 342-3 du code de l’énergie prévoit qu’un décret précise le délai d’élaboration ainsi que la périodicité de la mise à jour du schéma. La loi prévoit en outre que le décret définit le mode de détermination du périmètre de mutualisation des ouvrages inscrits dans le schéma.
Le décret du 10 juillet 2024 précise pour la France métropolitaine continentale, les modalités d'élaboration et de révision des schémas régionaux de raccordement au réseau des énergies renouvelables et supprime la possibilité d'adapter ces schémas. Il détaille également le régime applicable aux producteurs dont les ouvrages de raccordement ne sont pas prévus par le schéma en vigueur ainsi que les modalités d'accès à la capacité réservée prévue le schéma pendant une période d'un an après sa publication pour les installations demandant un raccordement au réseau de transport.
La CRE a rendu son avis sur le projet de décret dans sa délibération du 3 juillet 2024.
- Consulter le décret n°2024-789 du 10 juillet 2024
- Consulter la délibération de la CRE n°2024-128 du 3 juillet 2024
Décret relatif au bénéfice des garanties d'origine de biogaz pour les collectivités territoriales et au droit préférentiel d'achat des garanties d'origine des producteurs de biométhane sous contrat d'obligation d'achat
Le décret pris pour l’application de l’article L. 446-22 du code de l’énergie précise les modalités du transfert des garanties d'origine vers les communes, groupements de communes et métropoles dans lesquels une installation de production de biogaz inscrite sur le registre national des garanties d’origine est implantée.
Pour rappel, l’article L. 446-22 prévoit que ces collectivités peuvent bénéficier à titre gratuit de tout ou partie des garanties d’origine de l’installation. Le décret précise qu’elles doivent alors détenir un compte sur le registre national des garanties d’origine.
Le décret prévoit également les modalités d’achat des garanties d’origine par les producteurs.
La CRE a rendu son avis sur le projet de décret dans sa délibération du 28 mars 2024.
Arrêtés
Arrêté précisant le seuil d'émissions de gaz à effet de serre et la méthodologie pour qualifier l'hydrogène comme renouvelable ou bas-carbone
Ce texte définit le seuil d’émissions de gaz à effet de serre et la méthodologie permettant de qualifier la production d’hydrogène comme renouvelable ou bas carbone.
Pour l’hydrogène renouvelable, les émissions de gaz à effet de serre, exprimées en kilogrammes d'équivalent dioxyde de carbone par kilogramme d'hydrogène (kgCO2éq/kgH2) sont déterminées selon les règles décrites dans l'annexe du règlement européen 2023/1185.
Pour l’hydrogène bas-carbone, les règles de calcul des émissions sont déterminées selon la méthodologie décrite en annexe de l’arrêté.
Principales délibérations de la CRE
Délibération du 25 juin 2024 portant décision sur les prestations réalisées à titre exclusif par les gestionnaires de réseaux de distribution d’électricité
La délibération du 25 juin 2024 fixe le contenu et les tarifs des prestations annexes à destination des responsables d’équilibre, des particuliers, des entreprises et des collectivités réalisées à titre exclusif par les gestionnaires de réseaux publics de distribution d’électricité.
Les évolutions fixées par la délibération entrent en vigueur au 1er août 2024.
Délibération du 26 juin 2024 portant approbation des règles relatives aux réserves rapide et complémentaire et de la demande de dérogation relative à leur contractualisation
RTE a saisi la CRE par courrier reçu le 10 juin 2024 d’une proposition de jeu de règles pour les appels d’offres de réserves tertiaires rapide et complémentaire (« RR-RC »), pour livraison à partir du 1er janvier 2025.
Celles-ci sont adaptées à l'évolution du pas de règlement des écarts de 30 minutes actuellement à 15 minutes et présentent un nouveau calcul des pénalités de défaillance à la suite d’une demande de la CRE lors de la validation du précédent jeu de règles.
La CRE demande à RTE de réaliser, avant la prochaine évolution des règles, un retour d’expérience sur la fiabilité des offres RR-RC.
RTE a également saisi la CRE d’une demande de dérogation afin de continuer à contractualiser une partie des réserves tertiaires via un appel d’offres annuel. Pour l’année 2025, RTE prévoit de contractualiser 500 MW de réserve rapide et 250 MW de réserve complémentaire par le biais d’un appel d’offres annuel. Le volume restant sera contractualisé par appel d’offres journalier.
En cas d’activation par RTE de la clause relative à la hausse des volumes contractualisés dans le cadre de l’appel d’offres journalier, à la suite d’une évolution de l’incident dimensionnant en cours d’année, la CRE demande à RTE d’informer les acteurs de ce changement au moins 1 mois à l’avance.
La CRE approuve le jeu de règles pour les appels d’offres de RR-RC proposé par RTE, et accorde la dérogation prévue aux alinéas 9 et 10 de l’article 6 du règlement (UE) 2019/943 pour l’année 2025.
Délibération du 11 juillet 2024 relative à l’évaluation des charges de service public de l’énergie pour 2025 et à la réévaluation des charges de service public de l’énergie pour 2024
La CRE a procédé le 13 juillet 2023 à une première évaluation des charges de service public de l’énergie pour 2024 modifiée par une délibération du 21 septembre 2023. Les charges pour 2024 s’élevaient à 647,3 M€ lors de la réévaluation de septembre 2023.
Par sa délibération du 11 juillet 2024, la CRE réalise une réévaluation des charges pour 2024 en application de la loi de finances pour 2024. Ces charges s’établissent désormais à 4,2 Mds€. Cette réévaluation est fondée principalement sur le calcul des charges constatées au titre de 2023 et la mise à jour des charges prévisionnelles au titre de 2024.
Les deux principaux effets qui conduisent à cette augmentation de 3,5 Mds€ des charges pour 2024 sont deux évolutions opposées :
la hausse de 0,7 Mds€ à 6,6 Mds€ des charges liées au soutien aux énergies renouvelables en métropole continentale, du fait de la baisse des prix de gros de l’énergie, soit + 5,9 Mds€ ;
la baisse de 25,8 Mds€ à 22,4 Mds€ des charges liées aux boucliers tarifaires et aux amortisseurs au titre de 2023 (- 3,4 Mds€), également due à la baisse des prix de gros.
La CRE procède également à l’évaluation annuelle des charges pour l’année 2025, qui s’élèvent à 8,9 Mds€. Elles sont principalement fondées sur les charges prévisionnelles au titre de 2025, à hauteur de 9,5 Mds€, diminuées du complément de prix ARENH recouvré en 2024 par EDF, à hauteur de - 0,6 Mds€, qui revient ainsi au budget de l’État.
Délibération du 17 juillet 2024 portant orientations sur le modèle des conditions générales du Contrat Distributeur de Gaz – Fournisseur commun à tous les gestionnaires de réseaux de distribution de gaz
Le modèle de contrat Distributeur de Gaz – Fournisseur (CDG-F) énonce les droits et devoirs du gestionnaire du réseau public de distribution (GRD) et du fournisseur en matière d’accès au réseau public de distribution de gaz naturel, dans le cadre d’une offre de fourniture en contrat unique.
Conformément aux articles L. 111-97-1 et L. 134-3 du code de l’énergie, la CRE approuve les modèles de contrat, établis par chaque GRD.
Dans sa délibération du 17 juillet 2024, la CRE décrit les grands principes qui doivent guider chaque GRD lors de l’élaboration de son modèle de contrat CDG-F et y annexe un nouveau modèle de contrat, qui remplace celui de la délibération n°2021-238 de la CRE du 22 juillet 2021.
La CRE rappelle que la mise à jour des modèles de contrat CDG-F conformément au modèle de contrat annexé constitue un enjeu majeur pour l’accès des fournisseurs alternatifs au territoire des entreprises locales de distribution (ELD) et le bon fonctionnement du marché de détail du gaz.
La CRE demande que chaque GRD de gaz naturel lui soumette son modèle de contrat CDG-F pour approbation avant le 31 décembre 2024. Les contrats ainsi approuvés auront vocation à s’appliquer aux contrats en cours d’exécution.
La CRE demande aux fédérations d’ELD de mettre à disposition de leurs membres un contrat type retenant les options et les personnalisations les plus couramment rencontrées dans les ELD.
Délibération du 23 juillet 2024 portant décision relative à la modification de la délibération n°2023-133 portant approbation des modalités de l’appel d’offres 2024 de réserve rapide et complémentaire
RTE a saisi la CRE, par courrier reçu le 19 juillet 2024, d’une demande de modification de la délibération n°2023-133 du 26 mai 2023 portant approbation des modalités de l’appel d’offres 2024 de réserves rapide et complémentaire.
Pour l’année 2024, RTE demande à contractualiser un volume total de 650 à 700 MW de réserve rapide par le biais de l’appel d’offres journalier, à partir de la date d’atteinte de la puissance maximale de l’EPR de Flamanville. Cette proposition modifie le volume de contractualisation par le biais de l’appel d’offres journalier (500 MW), tel qu’initialement approuvé dans la délibération n°2023-133 du 26 mai 2023.
Sur la base des informations communiquées par EDF, RTE communiquera aux acteurs la puissance maximale et la date d’atteinte par l’EPR de Flamanville de sa puissance maximale, au moins un mois à l’avance.
La CRE approuve la demande de RTE, et modifie en conséquence la délibération n°2023-133 du 26 mai 2023. A compter de la date d’atteinte de la puissance maximale de l’EPR de Flamanville, le volume de réserve rapide contractualisé par le biais de l’appel d’offres journalier passera de 500 MW à 650-700 MW, soit environ 55 % du volume total de réserve rapide. Par conséquent, la dérogation accordée à RTE pour la contractualisation de réserve rapide par le biais d’un appel d’offres annuel correspondra à environ 45 % du volume total de réserve rapide.
LE JUGE
Conseil d'Etat
Rejet du recours dirigé contre l’approbation par la CRE du modèle de contrat d’accès au réseau public de transport d’électricité définitif pour les nouvelles interconnexions dérogatoires (CART-NID)
Par une décision du 19 juillet 2024, le Conseil d’Etat a rejeté la requête de la société ElecLink tendant à l’annulation de la délibération de la CRE du 17 mars 2022 portant approbation du modèle de CART-NID définitif.
Le Conseil d’Etat juge qu’ElecLink n’est pas fondée à soutenir que les modalités d’indemnisation seraient excessivement défavorables par rapport à celles applicables aux autres utilisateurs du réseau public de transport d’électricité (RPT) et par rapport aux « interconnexions régulées ». Il relève en effet que le gestionnaire d’une NID se trouve, au regard de l’objet de la délibération attaquée, à savoir l’accès au RPT, dans une situation qui n’est comparable, à la date de la délibération attaquée, à celle d’aucune des autres catégories d’utilisateurs du réseau et que la comparaison avec les interconnexions régulées, parties intégrantes du RPT qui sont exploitées par RTE sans contrat d’accès au réseau, est inopérante.
Le Conseil d’Etat juge également que le quota d’indemnisation prévu par le modèle de contrat a été calculé en fonction des besoins particuliers d’entretien et de maintenance du RPT dans la zone correspondante et que le plafond d’indemnisation de dix millions d’euros « n’est susceptible de s’appliquer, eu égard notamment à la circonstance que la plupart des indisponibilités non programmées sont d’une durée inférieure à 48 heures, que dans des situations exceptionnelles ».
- Consulter la décision du Conseil d’Etat n°467621 du 19 juillet 2024
- Consulter la délibération de la CRE n°2022-85 du 17 mars 2022
Rejet du recours dirigé contre les délibérations de la CRE portant sur le calcul du complément de prix de l’ARENH
La société E-Pango sollicitait l’annulation de la notification du complément de prix du dispositif de l’ARENH pour l’année 2022 ainsi que des délibérations de la CRE du 29 juin 2023 et du 20 juillet 2023 portant sur le calcul de complément de prix ARENH.
E-Pango critiquait le fait qu’un complément de prix CP1, fondé sur la totalité des quantités d’ARENH livrées, soit mis à la charge d’un fournisseur, dans l’hypothèse où les livraisons d’ARENH dont il a bénéficié seraient interrompues avant le début de la période de référence, alors même que ces quantités d’ARENH auraient été fournies aux clients de ce fournisseur.
Par une décision du 19 juillet 2024, le Conseil d’Etat, rejetant ce recours, juge qu’il découle du principe d’annualité de l’ARENH « qu’aucun droit n’est ouvert ex ante à un fournisseur qui n’envisagerait de n’être livré que pour une période infra-annuelle » et « que l’interruption de livraison, pour quelque raison que ce soit, révèle ex post l’absence de droit à ce dispositif et justifie le reversement, par le fournisseur, via le complément de prix CP1, du montant correspondant à la valorisation financière de la totalité des volumes effectivement livrés au cours de la période. ».
Le Conseil d’Etat relève également que le complément de prix CP1 « neutralise financièrement l’avantage économique retiré par un fournisseur qui a bénéficié de livraisons d’électricité nucléaire historique excédant celles auxquelles il avait droit eu égard à la consommation de base constatée de son portefeuille de clients, et ne présente pas le caractère d’une sanction. ».
- Consulter la décision du Conseil d’Etat n°477332 du 19 juillet 2024
- Consulter la délibération de la CRE n°2023-176 du 29 juin 2023
- Consulter la délibération de la CRE n°2023-207 du 20 juillet 2023
Rejet du recours dirigé contre la réévaluation des charges de service public de l’énergie pour 2023 par la CRE
Par une décision du 30 juillet 2024, le Conseil d’Etat a rejeté la requête de la société Ekwateur par laquelle elle demandait l’annulation de la délibération de la CRE du 3 novembre 2022 relative à la réévaluation des charges de service public de l’énergie pour 2023 (cf. L’Energie du droit n°57, avril 2023).
A l’appui de ce recours, Ekwateur excipait notamment de l’illégalité de la proposition des tarifs réglementés de vente d’électricité (TRVE) adoptée par la CRE le 20 janvier 2022. La requérante soutenait que cette proposition, qui a servi à calculer la compensation versée aux fournisseurs dans le cadre des mesures de gel tarifaire mises en œuvre en application de l’article 181 de la loi de finances pour 2022, aurait été fixée à un niveau insuffisamment élevé.
Se prononçant sur la légalité de cette proposition des TRVE, le Conseil d’Etat juge que la CRE n’a pas commis d’erreur manifeste d’appréciation, ni en retenant une période d’approvisionnement de référence linéaire s’étendant sur les deux années qui précèdent l’année de livraison ni en évaluant le coût des écarts au périmètre d’équilibre à un montant inférieur à 0,30 euro par mégawattheure. La CRE n’a pas davantage commis d’erreur en ne prenant pas en compte, d’une part, le coût lié à la liquidité effectivement observée sur les marchés de gros, les coûts d’intervention sur les marchés et les surcoûts résultant du recours à des produits de couverture dont la livraison est assurée physiquement et non uniquement financièrement et, d’autre part, le « décalage structurel d’application » en début d’année des tarifs.
Le Conseil d’Etat écarte donc le moyen tiré de ce que la délibération contestée serait illégale à raison de la méconnaissance, par la proposition des TRVE de la CRE, du principe de concurrence tarifaire effective découlant de l’article L. 337-6 du code de l’énergie.
L'EUROPE
Commission européenne
Publication du « Paquet gaz » et du Règlement relatif à la réduction des émissions de méthane
Le « Paquet gaz », comportant le Règlement (UE) 2024/1789 et la Directive (UE) 2024/1788 visant à réformer le marché européen de l’hydrogène et du gaz (cf. L’Energie du droit n°73, avril 2024), ainsi que le Règlement (UE) 2024/1787 concernant la réduction des émissions de méthane dans le secteur de l’énergie (cf. L’Energie du droit n°73, avril 2024) ont été publiés au Journal officiel de l’Union européenne le 15 juillet 2024.
- Consulter le Règlement (UE) 2024/1789 du 13 juin 2024 sur les marchés intérieurs du gaz renouvelable, du gaz naturel et de l’hydrogène, modifiant les règlements (UE) n° 1227/2011, (UE) 2017/1938, (UE) 2019/942 et (UE) 2022/869 et la décision (UE) 2017/684 et abrogeant le règlement (CE) n° 715/2009
- Consulter la Directive (UE) 2024/1788 du 13 juin 2024 concernant des règles communes pour les marchés intérieurs du gaz renouvelable, du gaz naturel et de l’hydrogène, modifiant la directive (UE) 2023/1791 et abrogeant la directive 2009/73/CE
- Consulter le Règlement (UE) 2024/1787 du 13 juin 2024 concernant la réduction des émissions de méthane dans le secteur de l’énergie et modifiant le règlement (UE) 2019/942
Aides d’Etat : résumé des décisions de juillet et août 2024
La Commission européenne a rendu 5 décisions approuvant des régimes d’aides d’Etat dans le secteur de l’énergie aux mois de juillet et août 2024 :
autorisation d’un régime français de 10,82 milliards d’euros visant à soutenir le déploiement de l’énergie éolienne en mer (2 juillet 2024, SA.109161) : le régime est autorisé sur le fondement de l’encadrement temporaire de crise en matière d’aides d’Etat adopté par la Commission européenne le 23 mars 2022, modifié le 9 mars 2023 (cf. L’Energie du droit, n°61, mars 2023) et prolongé le 2 mai 2024. Cette mesure vise à soutenir la construction et l’exploitation de deux parcs éoliens fixes en mer en zone Sud Atlantique et Centre Manche. L’aide prendra la forme d’une prime mensuelle variable au titre d’un contrat d’écart compensatoire bidirectionnel et sera octroyée sur la base de procédures d’appels d’offres. La durée du régime est de 20 ans ;
autorisation d’un régime français d’un montant de 1,5 milliard d’euros visant à soutenir la production de biométhane (24 juillet 2024, SA.108792) : la mesure est également autorisée sur le fondement de l’encadrement temporaire de crise et vise à soutenir la production de 1,6 TWh de biométhane durable par an, destiné à être injecté dans le réseau de gaz naturel. La mesure sera ouverte aux nouvelles installations ayant une production annuelle de biométhane supérieure à 25 GWh/an. Les bénéficiaires seront sélectionnés au moyen d’une procédure d’appel d’offres. Les aides seront octroyées au plus tard le 31 décembre 2025 sous forme de contrats d’écart compensatoire bidirectionnels conclus pour une durée de 15 ans ;
autorisation d’un régime espagnol d’un montant de 1,2 milliard d’euros visant à soutenir les investissements dans la production d’hydrogène renouvelable (25 juillet 2024, SA.114137) : le régime est également autorisé sur le fondement de l’encadrement temporaire de crise et vise à soutenir les investissements dans la production d’hydrogène renouvelable d’une capacité installée d’au moins 100 MW. L’aide concerne à la fois la production de carburants dérivés de l’hydrogène renouvelable, le stockage d’hydrogène renouvelable et la production d’électricité renouvelable. L’aide prendra la forme de subventions directes couvrant les coûts d’investissement des projets soutenus dont le montant sera déterminé au moyen d’un appel d’offres ;
autorisation d’un régime néerlandais d’un montant de 998 millions d’euros visant à soutenir la production d’hydrogène renouvelable (28 juillet 2024, SA.110068) : le régime vise à soutenir la production d’hydrogène en accroissant la capacité d’électrolyse des Pays Bas. L’aide sera octroyée à la suite d’une procédure d’appel d’offres ouverte aux projets d’une capacité d’au moins 0,5 MW. L’aide prendra la forme d’une subvention directe combinant une subvention initiale à l’investissement allant jusqu’à 80 % des coûts d’investissement et une prime variable sur une période de 5 à 10 ans ;
autorisation d’un régime néerlandais d’un montant de 80 millions d’euros visant à soutenir une technologie innovante pour la production d’hydrogène renouvelable (28 juillet 2024, SA.103720) : le régime vise à soutenir, sur trois ans, la construction et l’exploitation d’un projet innovant de démonstration pour la production d’hydrogène renouvelable. Ce projet vise à démontrer la faisabilité de la production d’hydrogène renouvelable à l’aide d’un électrolyseur alcalin au moyen d’électrodes à haute densité de courant, fournissant une production d’hydrogène à haute pression et laissant une faible empreinte spatiale. L’aide prendra la forme d’une subvention directe couvrant le déficit de financement escompté du projet. La construction de l’électrolyseur devrait commencer en 2024, le projet devant être opérationnel à partir de 2027.
Ces décisions de la Commission européenne n’ont pas encore été rendues publiques et seront consultables ultérieurement dans le registre des aides d’Etat.
- Consulter le communiqué de presse de la Commission européenne du 3 juillet 2024 (régime français)
- Consulter le communiqué de presse de la Commission européenne du 25 juillet 2024 (régime français)
- Consulter le communiqué de presse de la Commission européenne du 26 juillet 2024 (régime espagnol)
- Consulter le communiqué de presse de la Commission européenne du 29 juillet 2024 (régime néerlandais)
- Consulter le communiqué de presse de la Commission européenne du 29 juillet 2024 (régime néerlandais, démonstrateur hydrogène)
Agence de Coopération des Régulateurs de l’Energie (ACER)
Market Monitoring Report 2024 – volet relatif aux capacités d’échange entre zones et à la gestion de la congestion
L'ACER a publié le 3 juillet 2024 le volet de son Market Monitoring Report 2024 relatif aux capacités d’échange d’électricité entre zones, y compris les progrès réalisés pour atteindre l’exigence européenne de 70 % de capacités d’interconnexion mis à disposition des échanges transfrontaliers, et à la gestion de la congestion.
Dans ce volet, l’ACER souligne le besoin urgent, pour les gestionnaires de réseaux de transport (GRT), de maximiser la capacité de transport pour les échanges transfrontaliers afin d’atteindre l’objectif de 70 %. La marche à suivre proposée vise à mettre en œuvre, de manière harmonisée au sein de l’Union européenne, des processus coordonnés de gestion de la congestion, des investissements dans les réseaux et des améliorations des configurations des zones d’enchères.
Parmi les principaux constats de ce rapport :
le réseau électrique européen est de plus en plus congestionné. Les mesures correctives telles que le redispatching ont augmenté de 14,5 % en 2023 ;
certains GRT, dans des zones très maillées du réseau électrique européen, ont mis à disposition en moyenne entre 30 % et 50 % de capacité électrique aux frontières en 2023, loin d’atteindre l’objectif européen de 70 % ;
des progrès sont encore nécessaires quant au calcul de la capacité entre zones, comme le montre l’introduction du couplage de marché basé sur les flux dans la région Centre.
Modification des règles d’équilibrage européennes
Dans deux décisions du 5 juillet 2024, l’ACER modifie les règles d’équilibrage européennes, notamment dans le cadre de la mise en œuvre de la plateforme PICASSO, ainsi que la méthodologie de tarification sur toutes les plateformes d’équilibrage européennes.
La plateforme PICASSO a été lancée en juin 2022 par 26 gestionnaires de réseaux de transport (GRT) européens pour assurer l’échange d’énergie de réglage secondaire aussi appelée aFRR (automatic Frequency Restoration Reserve), sur le fondement du Règlement (UE) 2017/2195 de la Commission du 23 novembre 2017 concernant une ligne directrice sur l’équilibrage du système électrique.
Ces décisions de l’ACER modifient :
la méthodologie de tarification, en introduisant une approche harmonisée pour le calcul des prix sur les plateformes d'équilibrage européennes, y compris PICASSO ;
le cadre de mise en œuvre qui décrit la conception de PICASSO.
L’ACER estime qu’il est primordial que la plateforme PICASSO fonctionne efficacement pour renforcer la confiance dans le marché et garantir l’interconnexion rapide d’un plus grand nombre de GRT afin d’apporter davantage de liquidités sur le marché, garantissant une meilleure coordination à travers l’Europe et des coûts moins élevés pour les consommateurs.
- Consulter la décision n°08/2024 de l’ACER du 5 juillet 2024 relative aux amendements du cadre de mise en œuvre d’une plateforme européenne d’échange de capacités (en anglais)
- Consulter la décision n°09/2024 de l’ACER du 5 juillet 2024 relatif aux amendements du cadre de mise en œuvre d’une plateforme européenne d’échange de capacités (en anglais)
Lettre d’information trimestrielle n°37 de l’ACER relative à REMIT
L’ACER a publié, le 31 juillet 2024, la 37e édition de sa lettre d’information trimestrielle relative à REMIT couvrant le deuxième trimestre 2024. Cette édition comporte notamment :
un résumé de l’atelier organisé par l’ACER et la Commission européenne le 11 juin 2024 au sujet de la réforme du Règlement REMIT et de sa mise en œuvre ;
un aperçu actualisé des décisions de sanctions dans le cadre de REMIT pour 2024.
LA REGULATION
Comité de Règlement des Différends et des Sanctions (CoRDiS)
Sanction de 6 millions d’euros à l’encontre de la société Ohm Energie pour abus du droit d’ARENH
Par une décision du 11 juillet 2024, le CoRDiS a sanctionné la société Ohm Energie à hauteur de 6 millions d’euros pour avoir commis un abus du droit d’ARENH au sens de l’article L. 134-26 du code de l’énergie.
Dans le cadre de ses missions tendant à veiller au bon fonctionnement du marché de détail de l’électricité et à garantir une protection effective des consommateurs, la CRE a ouvert, le 9 septembre 2022, une enquête sur les pratiques de la société Ohm Energie.
A l’issue de cette enquête, la Présidente de la CRE a saisi le CoRDiS d’une demande de sanction. Celui-ci a prononcé le 11 juillet 2024 une sanction pécuniaire de 6 millions d’euros à l’encontre de la société Ohm Energie pour avoir commis un abus du droit d’accès à l’ARENH au cours des années 2021 et 2022.
Il s’agit de la première sanction du CoRDiS relative au marché de détail.
- Consulter le communiqué de presse du 15 juillet 2024
- Consulter la décision n°07-40-23 du 11 juillet 2024
Examen d’une demande de mesures conservatoires relative au raccordement provisoire d’une habitation en cours de construction
Saisi d’une demande de règlement de différend le 1er juillet 2024, assortie d’une demande de mesures conservatoires tendant au raccordement provisoire au réseau public de distribution d’électricité d’une habitation en cours de construction, le CoRDiS s’est prononcé le 23 juillet 2024 en urgence sur la demande de mesures conservatoires.
En l’espèce, lors de la séance publique, la demanderesse, Mme D. a fait valoir qu’elle disposait d’une servitude de passage et de canalisation, constituée par acte notarié en 2016. Selon Mme D., cette servitude lui donnerait le droit au passage d’un réseau d’électricité sur la parcelle adjacente à la sienne et incorporée au domaine privé de la commune, afin de raccorder provisoirement sa parcelle au réseau public de distribution d’électricité.
Lors de cette séance, la société Enedis s’est engagée, d’une part, à dépêcher sur les lieux une équipe de ses agents, à charge pour elle d’y intervenir dans un délai d’une semaine suivant la notification de la décision du CoRDiS et, d’autre part, à présenter à Mme D., dans un délai de dix jours suivant cette même notification, une proposition de raccordement provisoire de la parcelle, sous réserve des droits des tiers et en considération de l’acte notarié de 2016 invoqué par Mme D.
Le CoRDiS prend acte des engagements pris par Enedis au cours de la séance publique et prononce, par conséquent, un non-lieu à statuer sur la demande de raccordement provisoire. La demande de règlement de différend au fond, qui porte sur le raccordement définitif, est quant à elle en cours d’instruction.
ET AUSSI
Lignes directrices de la CRE pour le renforcement de la protection des consommateurs d’électricité et de gaz naturel
La CRE a publié le 11 juillet 2024 des lignes directrices relatives aux pratiques des fournisseurs d’électricité et de gaz naturel afin de renforcer l’information et la protection des consommateurs. Ce document s’insère dans le cadre des chantiers de la CRE visant à renforcer le bon fonctionnement des marchés de l’électricité et du gaz naturel au bénéfice des consommateurs, comprenant également le suivi de la cohérence des offres des fournisseurs ainsi que la mise en place de règles prudentielles. A ce titre, la CRE a élaboré 13 mesures spécifiques couvrant l’ensemble du parcours client telles que la clarification de la typologie des offres, l’obligation d’affichage des prix, le respect de l’engagement sur le prix ou l’information en cas de renouvellement ou de fin du contrat. Ces lignes directrices concernent, dans un premier temps, toutes les offres s’adressant aux consommateurs résidentiels.
Avant le 30 septembre 2024, les fournisseurs d’électricité et de gaz naturel qui le souhaitent doivent signifier leur engagement à respecter l’intégralité des lignes directrices. La CRE publiera le nom des fournisseurs qui s’engageront pour le renforcement de la protection du consommateur ainsi que de ceux qui ne s’engageront pas. Un contrôle sera établi par la CRE sur les pratiques des fournisseurs qui se sont engagés à les respecter.
- Consulter les Lignes directrices de la CRE relatives aux pratiques des fournisseurs d’électricité et de gaz naturel
Rapport de la CRE sur la mise en œuvre du seuil minimal de 70 % des capacités d’interconnexion pour les échanges d’électricité aux frontières françaises
Depuis début 2020, les gestionnaires de réseau de transport d'électricité européens doivent mettre à disposition des échanges transfrontaliers au moins 70 % des capacités d’interconnexion, conformément au règlement sur le marché intérieur de l’électricité. Chargée de vérifier la mise en œuvre de ce seuil minimal pour la France, la CRE publie le rapport détaillant les performances de RTE sur les différentes frontières durant l’année 2023.
Le rapport constate qu’en 2023, RTE a été en mesure de garantir le seuil minimal de 70 % dans 90 % des pas de temps en moyenne sur les trois régions évaluées, ce qui représente un niveau très élevé à l’échelle européenne. RTE a ainsi très majoritairement respecté ses obligations en 2023.
En outre, le rapport montre que, dans les périodes où le seuil de 70 % n’est pas atteint, la capacité mise à disposition par RTE aux frontières françaises reste élevée, ce qui constitue un véritable atout pour les échanges transfrontaliers.
Consulter le rapport du 24 juillet 2024
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