L'énergie du droit - numero 75

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EN BREF

LES TEXTES 

Décret relatif à l’autorisation de fourniture d’électricité et à l’abattement du tarif d’utilisation des réseaux publics d’électricité

Décret relatif aux travaux d’anticipation et de mutualisation des ouvrages de raccordement des installations de consommation

LE JUGE

CJUE : transition entre les mécanismes de soutien à destination des producteurs d’électricité à partir de sources renouvelables (régime d’aide)

Conseil d’Etat : défaut de qualité à agir de requérants n’ayant pas bénéficié du tarif d’achat photovol-taïque « S10 » pour contester le refus implicite de notification de ce tarif à la Commission européenne
 

L’EUROPEPublication de la réforme du marché européen de l’électricité
LA REGULATION

CoRDiS : décision de règlement de différend relatif au raccordement de plusieurs installations de consommation d'électricité au réseau public de distribution d'électricité

ET AUSSI

Avis de l’Autorité de la concurrence sur le fonctionnement concurrentiel des infrastructures de recharge pour véhicules électriques

[Actualités de juin 2024]

 

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LES TEXTES

Décrets 

Décret relatif à l’autorisation de fourniture d’électricité et à l’abattement du tarif d’utilisation des réseaux publics d’électricité

Le décret du 27 juin 2024 précise les modalités de l’autorisation que les producteurs d'électricité doivent obtenir lorsqu’ils concluent un contrat de vente directe d'électricité à des consommateurs finals ou à des gestionnaires de réseaux pour leurs pertes.

Ce texte modifie l’article R. 333-1 du code de l’énergie qui définit la notion de « contrat de vente directe d’électricité ». Ne sont pas concernés par l’obligation d’être titulaire de l’autorisation les producteurs parties aux contrats d’achat d’électricité dits « financiers » dans lesquels la totalité de la consommation est fournie par le fournisseur dans le cadre d’un contrat de fourniture classique. 

Le décret prévoit également un régime unique d’autorisation pour la fourniture d’électricité aux consommateurs finals. En particulier, il étend le contrôle des capacités techniques, financières et économiques du pétitionnaire aux sociétés le contrôlant. Le pétitionnaire doit également transmettre une note afin de décrire les caractéristiques techniques et commerciales du projet en précisant la clientèle envisagée ainsi que les modalités de couverture des offres proposées. La CRE avait délibéré en ce sens dans son avis du 18 janvier 2024.

Concernant l’abattement du tarif d’utilisation des réseaux publics d’électricité aux groupements de sites au sein d’une même plateforme industrielle, le décret précise la définition de la puissance moyenne du groupement qui avait précédemment été retenue, et soumise à délibération de la CRE du 25 octobre 2023. Désormais, la puissance maximale moyenne du groupement correspond à la valeur maximale de la moyenne glissante sur vingt-quatre heures des puissances appelées par l'ensemble des sites qui composent le groupement.

Décret relatif aux aides en faveur des très petites entreprises (TPE) éligibles au bouclier et à l'amortisseur et de l'habitat collectif résidentiel face à l'augmentation du prix de l'électricité et du gaz naturel pour le second semestre 2022 et pour 2023 et 2024

Ce décret décale la date limite de demande de l'aide en faveur des TPE éligibles au bouclier tarifaire et à l’amortisseur pour l'année 2023 jusqu’au 30 septembre 2024.

Il met également en cohérence les dates de transmission des certifications, par les commissaires aux comptes, du reversement de l’aide en faveur des clients bénéficiaires avec les guichets de demande corrective de clôture pour le second semestre 2022, pour 2023 et 2024, pour l'électricité et le gaz naturel.

Décret modifiant la partie réglementaire du code de l'énergie relative aux compléments de prix de l'accès régulé à l'énergie nucléaire historique (ARENH) et au compte « transition énergétique » géré par la Caisse des dépôts et consignations

Pris pour l’application de l’article 225 de la loi de finances pour 2024, le texte prévoit que les compléments de prix ARENH (CP1) calculés en 2024 au titre de l’année 2023 sont reversés au budget de l’Etat et non redistribués entre les fournisseurs. La CRE a rendu un avis sur le projet de décret par une délibération du 16 avril 2024. 

Il est prévu que les montants versés par les fournisseurs au titre du complément de prix sont versés à EDF et déduits de la compensation des charges de service public de l’énergie (CSPE). Le projet de décret prévoit également le cadre applicable dans l’hypothèse où la totalité des montants dus par les fournisseurs ne serait pas collectée. 

La CRE définit sa méthodologie de mise en œuvre de ces modifications réglementaires dans sa délibération du 26 juin 2024. Elle supprime ainsi les dispositions concernant la répartition entre fournisseurs des montants collectés au titre du CP1. 

Décret relatif aux travaux d’anticipation et de mutualisation des ouvrages de raccordement des installations de consommation

La loi du 10 mars 2023 relative à l’accélération de la production d’énergies renouvelables (loi APER) permet au gestionnaire du réseau de transport (GRT), la société RTE, après autorisation de la CRE, de dimensionner des travaux de raccordement d’une capacité supérieure à celle strictement nécessaire à l’installation concernée afin d’anticiper des raccordements futurs. 

Pris en application de cette loi, le décret introduit une définition ad hoc de l’extension lorsqu’elle s’inscrit dans l’hypothèse d’une anticipation du raccordement par le GRT, qui permet à RTE d’anticiper ces ouvrages sans attendre la réception de demandes de raccordement. 

Le décret définit également les modalités de calcul de la quote-part des coûts des ouvrages mutualisés dont sont redevables les gestionnaires de réseau de distribution (GRD) ainsi que les consommateurs. La CRE pourra plafonner la quote-part unitaire pour les installations raccordées en domaine haute tension de niveau 1(HTB1) lorsque cette quote-part intègre le coût d'ouvrages électriques du niveau de tension le plus élevé (HTB3).

La quote-part pourra en outre être adaptée par la CRE sur demande de RTE en cas d’évolution des ouvrages d’extension mutualisés ou de leurs coûts. La CRE pourra également modifier la durée durant laquelle la quote-part s’applique afin d’assurer la pertinence technique et économique des investissements réalisés par RTE.

Le décret prévoit que la quote-part s’applique à toute installation de consommation ou poste du réseau public de distribution n’ayant pas encore fait l’objet d’une convention de raccordement. Dans son avis du 26 avril 2024, la CRE avait précisé que la quote-part s’appliquera également aux installations demandant la modification de leur raccordement. 

Enfin, le décret prévoit la procédure d’autorisation des investissements par la CRE.

La CRE a rendu un avis sur le projet de décret par une délibération du 26 avril 2024.

Arrêtés

Arrêté désignant l'organisme en charge du registre national des garanties d'origine de l'électricité produite à partir de sources d'énergie renouvelables ou par cogénération et de la mise aux enchères des garanties d'origine de l'électricité produite à partir de sources renouvelables

Le code de l’énergie prévoit que le ministre chargé de l’énergie désigne un organisme pour assurer la délivrance, le transfert et l'annulation des garanties d'origine de l'électricité renouvelable ou produite par cogénération pour une durée déterminée.

Cet arrêté prolonge la désignation de l’organisme European Energy Exchange AG du 30 juin au 30 septembre 2024. 

Arrêté du 12 juin 2024 relatif aux demandes de chèque énergie prévues par l’article 6 du décret du 4 mai 2024 relatif au chèque énergie émis au titre de l’année 2024 et modifiant les modalités de la mise en œuvre du chèque énergie

A la suite de la suppression de la taxe d'habitation en 2023, le décret du 4 mai 2024 fixe les conditions d'éligibilité au chèque énergie émis au titre de 2024.  

Cet arrêté fixe la date limite de dépôt de ces demandes auprès de l'Agence de services et de paiement au 31 décembre 2024. La liste des pièces justificatives à joindre à la demande est également prévue par l’arrêté. 

Arrêté modifiant l'arrêté du 13 décembre 2016 fixant les conditions d'achat et du complément de rémunération pour l'électricité produite par les installations utilisant l'énergie hydraulique des lacs, des cours d'eau et des eaux captées gravitairement 

L’arrêté met en conformité le périmètre du guichet ouvert avec les lignes directrices européennes concernant les aides d’État au climat, à la protection de l’environnement et à l’énergie. 

La CRE a rendu son avis sur le projet d’arrêté dans sa délibération du 14 décembre 2023.

Principales délibérations de la CRE

Délibération de la CRE du 26 juin 2024 portant décision sur le calcul du complément de prix ARENH sur l’année 2023

La CRE actualise les règles en vigueur concernant les modalités de calcul du complément de prix en application du décret modifiant la partie réglementaire du code de l'énergie relative aux compléments de prix de l'accès régulé à l'énergie nucléaire historique (ARENH) et au compte « transition énergétique » géré par la Caisse des dépôts et consignations (voir ci-dessus).

La référence de prix pour le terme CP1 pour l’année 2023 s’élève à 61,71 €/MWh. En application de la délibération de la CRE du 7 octobre 2021, la référence de prix pour le terme CP2 pour l’année 2023 s’élève à 20 €/MWh (cf. L’Energie du droit n°45, octobre 2021). 

Le montant total actualisé dû par 90 fournisseurs au titre du CP1 s’élève à 555,1 M€. Ce montant sera entièrement dirigé vers le budget de l’Etat, dans la limite des montants effectivement recouvrés en application de l’article L. 336-5 du code de l’énergie, en déduction de la compensation des charges imputables aux missions de service public assignées à EDF que l’Etat devra lui verser pour l’année 2024.

Par ailleurs, 3 fournisseurs sont redevables d’un montant au titre du terme CP2 du complément de prix, pour un montant total actualisé de 482 000€. Ce montant sera également dirigé vers le budget de l’Etat en déduction de la compensation des charges de service public de l’énergie d’EDF.

Délibération de la CRE du 30 mai 2024 portant communication sur le contrôle de la cohérence des offres proposées par les fournisseurs d’électricité et de gaz naturel

Par cette délibération, la CRE met en place le cadre de collecte des données auprès des fournisseurs, avec pour objectif un démarrage des contrôles de cohérence au 1er janvier 2025.

Le contrôle de cohérence de la CRE portera sur les prix des offres disponibles à la souscription pour les nouveaux clients et sur ceux des contrats en cours. Ce contrôle a vocation à devenir systématique pour le marché des petits consommateurs. 

Si la CRE identifie des offres dont les prix sont décorrélés des conditions économiques pesant sur les fournisseurs, elle pourra demander des corrections, informer les consommateurs ou saisir l’Autorité de la Concurrence ou la Direction Générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes. 

Enfin, au titre de sa mission générale de surveillance, la CRE élargit le périmètre des fournisseurs devant lui transmettre des éléments permettant une surveillance plus exhaustive du marché de détail. 

Délibération portant projet de décision sur les prestations réalisées à titre exclusif par les gestionnaires de réseaux de distribution d’électricité

La CRE est compétente pour fixer la méthode d’élaboration des tarifs des prestations annexes réalisées à titre exclusif par les gestionnaires de réseaux. Elle se prononce également sur l’évolution de ces tarifs. 

Dans sa délibération du 21 juin 2023, la CRE définit le contenu, les tarifs des prestations annexes réalisées à titre exclusif par les gestionnaires de réseaux de distribution d’électricité ainsi que leurs modalités d’évolution. En application des formules d’indexation annuelle reconduites par la délibération du 6 juin 2024, les tarifs des prestations évoluent au 1er août 2024 de 4,8 %.

Cette délibération fixe également le contenu et les tarifs des prestations annexes à destination des responsables d’équilibre, des particuliers, des entreprises et des collectivités, réalisées à titre exclusif par les gestionnaires de réseaux de distribution d’électricité. 

LE JUGE

Cour de justice de l'Union Européenne (CJUE)

Précisions sur l’exonération de l’accise sur l’électricité utilisée pour l’électrolyse

Une société polonaise ayant bénéficié, au titre de 2016, de l’exonération de l’accise sur l’électricité utilisée pour l’électrolyse dans le cadre de ses activités a demandé le remboursement partiel des montants acquittés auprès de l’administration fiscale polonaise, alléguant qu’elle aurait dû bénéficier d’une exonération supplémentaire en sa qualité d’« entreprise grande consommatrice d’énergie » et que le coût réel de l’énergie achetée devrait comprendre les frais de distribution et les coûts pour l’acquisition, imposée par voie règlementaire, des certificats d’origine.

Par la décision du 14 mai 2018, le tribunal administratif de voïvodie de Bydgoszcz a confirmé le rejet de la demande de remboursement aux motifs que ces exonérations, prévues par la directive 2003/96/CE du 27 octobre 2003, ne sont pas cumulables et que les frais de distribution, autres que le coût d’achat de l’électricité, n’en constituent pas des éléments même s’ils sont nécessaires pour l’achat et l’utilisation de l’électricité.

Saisie d’une demande tendant à l’annulation de cette décision, la Cour suprême administrative de Pologne a adressé une question préjudicielle portant sur l’interprétation de la directive précitée, et plus particulièrement sur la question de savoir si les charges supplémentaires, telles que les tarifs de distribution, constituent des « taxes ».

Dans son arrêt du 13 juin 2024, la CJUE décide, d’une part que le coût réel de l’énergie achetée doit comprendre des charges supplémentaires, qui ne sauraient constituer des « taxes », telles que les tarifs de distribution obligatoires de cette énergie supportés, en vertu de la réglementation nationale, lors de l’achat de ladite énergie.

Elle juge, d’autre part, que la directive précitée ne s’oppose pas à une réglementation nationale qui prévoit qu’une exonération des droits d’accises sur l’achat d’électricité est refusée à une « entreprise grande consommatrice d’énergie » lorsque cette entreprise bénéficie, pour cette électricité, d’une exonération des droits d’accises réservée à l’électricité utilisée dans les processus électrolytiques, même si ladite entreprise démontre que, pour la même énergie, elle ne bénéficierait pas simultanément de ces deux exonérations et que le montant total desdites exonérations ne dépasse pas le montant des droits d’accises versé au titre de la même période, à condition que le critère défini par la réglementation nationale à cet égard soit conçu et appliqué conformément au principe d’égalité de traitement.

Transition entre les mécanismes de soutien à destination des producteurs d’électricité à partir de sources renouvelables

Le décret législatif italien du 16 mars 1999 prévoyait un mécanisme de soutien aux énergies renouvelables sous la forme de « certificats verts », octroyés aux producteurs d’électricité renouvelable, consistant en une obligation d’achat desdits certificats verts pour les importateurs et producteurs d’électricité non renouvelables n’injectant pas dans le réseau national, au cours de l’année suivante, un quota d’électricité produite à partir de sources renouvelables.

Avec l’adoption des décrets législatifs italiens des 3 mars 2011 et 6 juillet 2012, ce mécanisme de soutien a été progressivement remplacé par un dispositif fondé sur l’octroi de « tarifs de rachat incitatifs » qui impose aux producteurs d’électricité renouvelable de conclure une convention « GRIN » avec le gestionnaire de services énergétiques (GSE) pour en bénéficier.

Le tribunal administratif régional pour le Latium a fait droit au recours intenté par 21 producteurs d’électricité renouvelable au motif que l’obligation de conclure un contrat GRIN s’appliquerait uniquement aux producteurs dont les installations ont été mises en service après le 31 décembre 2012. Par suite de l’appel interjeté par le GSE, la juridiction suprême italienne a adressé une question préjudicielle à la CJUE.

La CJUE affirme, dans son arrêt du 27 juin 2024, que la Directive 2009/28/CE du 23 avril 2009 « ne s’oppose pas à une réglementation nationale qui, dans le contexte du remplacement [du mécanisme de soutien sus décrit], subordonne le bénéfice de ce dernier régime à la conclusion d’une convention portant sur les conditions d’octroi de ce soutien entre une telle entreprise et une entité contrôlée par l’État chargée de la gestion et du contrôle dudit dernier régime, y compris pour les entreprises qui, compte tenu de la date de mise en service de leurs installations, bénéficiaient du régime national de soutien fondé sur des quotas et l’octroi de certificats verts ».

Conseil d'Etat

Précision sur les prestations pouvant faire l’objet d’une contribution au titre du raccordement

Par sa délibération du 23 avril 2023, la CRE a approuvé les modalités de facturation de la prestation « Impact Projet Réseau » (IPR) d’Enedis consistant en une étude de l’impact sur le réseau d’un projet de raccordement, financée par une contribution à la charge du futur demandeur au raccordement (cf. L’Energie du droit n°62, avril 2023).

Le Caloch Consultant, une société proposant des prestations similaires, a contesté cette délibération auprès Conseil d’Etat en estimant notamment qu’il s’agissait d’une prestation relevant du domaine concurrentiel. 

Par sa décision du 25 juin 2024, le Conseil d’Etat annule la délibération de la CRE précitée « en tant que ce barème fixe les prix facturés pour la prestation intitulée "étude de l’impact d’un projet sur le réseau" ».

Le Conseil d’Etat estime que la prestation IPR relève des missions de service public d’Enedis depuis la loi du 24 décembre 2019 (dite loi LOM) mais que son coût ne peut pas faire l’objet d’une contribution du demandeur du raccordement. Il relève que cette prestation est liée à la mission d’Enedis de fournir aux utilisateurs les informations nécessaires à l’accès au réseau (5° de l’article L. 322-8 du code de l’énergie), et non à celle du raccordement stricto sensu (4° de l’article L. 322-8 du code de l’énergie). Dès lors, le coût de cette prestation doit être intégralement couvert par le TURPE.

Le Conseil d’Etat annule la délibération de la CRE, mais seulement en tant que cette délibération fixe les tarifs facturés pour la prestation IPR.

Défaut de qualité à agir des requérantes n’ayant pas bénéficié du tarif S10 pour contester le refus implicite de notification de ce tarif à la Commission européenne

Dans sa décision du 25 juin 2024, le Conseil d’Etat rejette la requête de sociétés productrices d’électricité d’origine photovoltaïque qui demandaient l’annulation du refus implicite du Premier ministre de notifier à la Commission européenne le tarif d’achat « S10 » et d'enjoindre à l’Etat de le notifier.

Le Conseil d’Etat conclut au défaut de qualité à agir des sociétés requérantes tiré du fait qu’elles n'ont pas bénéficié du tarif S10 et ne pourront pas en bénéficier du fait de l'abrogation de l'arrêté du 12 janvier 2010 par l'arrêté du 31 août 2010.

S’agissant du rejet, par le juge civil, de leurs demandes en indemnisation du préjudice subi résultant de la privation de cette aide au motif de son illégalité (défaut de notification), le Conseil d’Etat considère qu’il résulte des stipulations de l'article 108 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE) que, même dans le cas où la Commission déclarerait cette aide compatible avec le marché intérieur, une telle déclaration serait dépourvue d'effet rétroactif et serait, par suite et en tout état de cause, sans incidence sur le motif qui leur a été opposé par le juge civil.

Enfin, il estime que la seule qualité de contribuable de l'Etat ne saurait conférer un intérêt suffisant pour attaquer une décision dont l'annulation serait susceptible d'entraîner une augmentation des recettes du budget de l'Etat.

Annulation de la fiche relative au covoiturage longue distance

Par sa décision du 25 juin, le Conseil d’Etat annule l’arrêté du 26 septembre 2022 relatif aux opérations standardisées d’économie d’énergie en tant qu'il crée l'opération standardisée n°TRA-SE-114 relative au covoiturage de longue distance.

Le Conseil d’État estime que « FlixBus est fondée à soutenir qu'en valorisant à hauteur d'un montant de 18 800 kWh cumac la réalisation de l'opération standardisée n° TRA-SE-114, sur la base d'une durée de vie conventionnelle de 12 années, la ministre de la Transition énergétique a entaché sa décision d’une erreur manifeste d’appréciation » en considérant notamment que la fiche de calcul reposait sur des paramètres manquant de précision.

L'EUROPE

Parlement européen

Publication de la réforme du marché européen de l’électricité

Adoptée en séance plénière par le Parlement européen (cf. L’Energie du droit n°73, avril 2024), la réforme de l’organisation du marché de l’électricité a été publiée au Journal officiel de l’Union européenne (JOUE) du 26 juin 2024. Cette réforme comporte un règlement ainsi qu’une directive. 

Pour rappel, cette réforme, présentée par la Commission européenne le 14 mars 2023 (cf. L’Energie du droit n°61, mars 2023), vise notamment à rendre les prix de l'électricité moins dépendants de la volatilité des prix des combustibles fossiles, à protéger les consommateurs contre les flambées des prix, à accélérer le déploiement des énergies renouvelables et à améliorer la protection des consommateurs.

Les deux textes entreront en vigueur vingt jours après leur publication.

Commission européenne

Autorisation d’un régime italien visant à soutenir la production d’électricité à partir de sources d’énergie renouvelable 

La mesure vise à soutenir un total de 4 590 mégawatts de nouvelles capacités de production d’électricité à partir de sources d’énergie renouvelable. Le régime soutiendra la construction de nouvelles centrales utilisant des technologies innovantes et qui ne sont pas encore arrivées à maturité telles que l’énergie solaire flottante, l’énergie marémotrice et houlomotrice. Les projets seront sélectionnés par le biais d’une procédure d’appel d’offres.

L’aide prendra la forme d’un contrat d’écart compensatoire bidirectionnel pour chaque kilowattheure d’électricité produit et injecté dans le réseau et sera versée pendant une durée correspondante à la durée de vie des centrales. Celle-ci s’appliquera jusqu’au 31 décembre 2028 et sera financée au moyen d’un prélèvement sur la facture d’électricité des consommateurs finals.

Autorisation d’un régime allemand visant à soutenir le développement du Réseau Central d’Hydrogène (Hydrogen Core Network, HCN)

Cette mesure vise à faciliter les investissements relatifs à la reconversion des gazoducs existants pour le transport de l'hydrogène ainsi qu'à la construction de nouveaux gazoducs et stations de compression d'hydrogène.

L'aide, de 3 milliards d'euros, prendra la forme d'une garantie de l'État qui permettra aux GRT d'obtenir des prêts plus favorables pour couvrir les pertes initiales dans la phase de montée en puissance du HCN. Le premier grand gazoduc devrait être opérationnel à partir de 2025, tandis que l'achèvement de l'ensemble du HCN est prévu pour 2032. 

Cette mesure contribuera à la réalisation des objectifs de la stratégie de l'Union européenne pour l'hydrogène et du paquet « Fit for 55 », en permettant la création de l'infrastructure de transport d'hydrogène nécessaire pour encourager l'utilisation d'hydrogène renouvelable dans l'industrie et les transports d'ici à 2030.

Agence de Coopération des Régulateurs de l’Energie (ACER)

Consultation publique relative à la mise à jour des règles en matière de raccordement au réseau de transport électrique

L’ACER ouvre une consultation publique, jusqu’au 8 septembre 2024, sur la mise à jour du Règlement 2016/1447 de la Commission du 26 août 2016 établissant un code de réseau relatif aux exigences applicables au raccordement au réseau des systèmes en courant continu à haute tension et des parcs non synchrones raccordés en courant continu.

Ce code de réseau détaille les exigences européennes en matière de raccordement au réseau de transport électrique. Cette mise à jour vise à adapter le texte aux tendances actuelles telles que l’augmentation de la capacité de production en mer ou la connexion au réseau de nouveaux utilisateurs tels que les acteurs du stockage. 

L'ACER soumettra sa proposition d'amendement à la Commission européenne d'ici fin 2024.

Consultation publique relative à l’annexe du règlement d’exécution de REMIT

L’ACER ouvre une consultation publique, jusqu’au 6 septembre 2024, sur la mise à jour du Règlement 1348/2014 de la Commission du 17 décembre 2014 concernant la déclaration des données en application de l’article 8, paragraphes 2 et 6, du Règlement 1227/2011 du Parlement européen et du Conseil concernant l’intégrité et la transparence du marché de gros de l’énergie (REMIT). 

La révision de REMIT en 2024 (cf. l’Energie du droit n°73, avril 2024) a modifié les obligations de déclaration des données et l’ACER a reçu de nombreuses demandes de clarification de l’annexe décrivant les types d’informations à communiquer.

LA REGULATION

Comité de Règlement des Différends et des Sanctions (CoRDiS)

Différend relatif au raccordement de plusieurs installations de consommation d'électricité au réseau public de distribution d'électricité

Après avoir procédé à une seconde liquidation d’astreinte dans le différend opposant la SCI Garabeuf et la SARL Aquitaine Promotions au Syndicat mixte d’électricité de Martinique (SMEM) et à EDF (cf. L’Energie du droit n°74, mai 2024), le Comité rappelle, dans sa décision du 29 mai 2024, qu’il est compétent pour régler les différends portant sur l’accès au réseau public de distribution d’électricité, tant à l’égard du gestionnaire de réseau de distribution que de l’autorité organisatrice de la distribution d’énergie (AODE, ici le SMEM).

En outre, à la suite d’une mesure d’instruction diligentée auprès des parties afin de connaître le fondement de la facturation, par le SMEM, de 20 % du coût des travaux d’extension aux sociétés demanderesses, le SMEM a finalement remboursé cette somme auxdites sociétés. 

Dans ces conditions, et au vu des déclarations du SMEM et de EDF sur l’avancement de la réalisation des travaux d’extension et de branchement, le CoRDiS estime qu’il n’existe plus de différend entre les parties portant sur le raccordement des installations en litige. 

Le CoRDiS règle ainsi, au terme d’une saga contentieuse qui a conduit à l’adoption de quatre décisions dont deux décisions de liquidation d’astreinte, le différend opposant la SCI Garabeuf et la SARL Aquitaine Promotions au SMEM et à EDF.

Office of gas and electricity markets (OFGEM) 

Sanction en réparation pour l’exploitant d’un parc éolien en mer pour prix excessifs

À la suite d'un examen de l'OFGEM, Beatrice Offshore Windfarm Limited (BOWL), l'exploitant d'un parc éolien au large de la côte nord-est de l'Écosse, a reconnu avoir enfreint l'une des conditions de son autorisation en facturant des prix excessifs pour réduire sa production, pourtant nécessaire pour maintenir l'équilibre du réseau électrique, entrainant une hausse des coûts pour les consommateurs.

Après avoir déclaré que la violation était involontaire, BOWL a accepté la position de l'OFGEM en acceptant de verser l’indemnité de réparation de 33,14 millions de livre sterling (approximativement 40 millions d’euros) et en s’engageant à modifier sa politique en matière de prix des offres afin d’éviter que la situation ne se reproduise. 

ET AUSSI

Avis de l’Autorité de la concurrence (ADLC) sur le fonctionnement concurrentiel des infrastructures de recharge pour véhicules électriques (IRVE)

L’ADLC publie le 11 juin 2024 son avis du 30 mai 2024 relatif au secteur des IRVE. Elle s’est appuyée, notamment, sur les travaux de la CRE et de l’Autorité de régulation des transports.

L’analyse concurrentielle, concentrée sur la France métropolitaine (hors Corse), s’est focalisée sur deux secteurs complémentaires : les IRVE accessibles au public et les activités liées (installation et d’exploitation des IRVE et la fourniture des services de mobilité et d’interopérabilité, à l’exclusion des autres activités relatives à la fourniture au détail d’électricité, à la fabrication des bornes de recharge ou à la fourniture de services de marque blanche), ainsi que les IRVE à usage privatif dans les logements collectifs.

L’ADLC adresse des recommandations d’ordre législatif, règlementaire et organisationnel pour compléter le cadre juridique applicable et optimiser l’accompagnement par les pouvoirs publics, afin de créer les conditions propices à l’émergence d’un secteur concurrentiel et soutenir les consommateurs dans leurs changements d’habitudes de consommation.

L’ADLC précise que les risques concurrentiels exposés dans son avis, qui ne sont pas exhaustifs et devront être réévalués à mesure du développement du secteur, ont pour objectif d’alerter les acteurs sur des points de vigilance, indispensables pour préserver une concurrence par les mérites dans ces secteurs cruciaux pour la décarbonation des transports. 

Elle rappelle la possibilité, nouvellement ouverte aux acteurs du secteur, de solliciter des orientations informelles en matière de développement durable, dans le cadre du communiqué de procédure publié en mai 2024.

Le Comité de rédaction

Alexandra BONHOMME 

Emmanuel RODRIGUEZ 

David MASLARSKI

Pauline KAHN DESCLAUX

Julie MICHEL

Claire PARGUEY

Paul VIEL

Lucie VANHAESBROUCKE

 

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