L'énergie du droit - numero 73

Actualité Électricité Gaz

Publié le

EN BREF

LES TEXTES 

Loi du 11 avril 2024 visant à protéger le groupe Electricité de France d’un démembrement

Décret relatif au développement de l'agrivoltaïsme et aux conditions d'implantation des installations photovoltaïques sur des terrains agricoles, naturels ou forestiers

Communication de la CRE relative à la publication des coûts marginaux prévisionnels de production d’électricité dans les zones non interconnectées aux horizons 2028 et 2038

LE JUGE

Cour européenne des droits de l’Homme : reconnaissance du droit des individus d’être protégés par l’Etat contre les effets néfastes graves du changement climatique sur leur vie

Conseil d’Etat : validation du régime visant à réduire les délais de jugement applicables au contentieux de certaines installations de production d’énergie renouvelable

L’EUROPE

Publication de la révision du Règlement REMIT au Journal officiel de l’Union européenne

Adoptions formelles par le Parlement européen :
- du règlement relatif aux fuites de méthane
- de la réforme de l’organisation du marché de l’électricité
- de la réforme du marché européen de l’hydrogène et du gaz

LA REGULATION

CoRDiS : décision de règlement de différend relatif aux conditions de mise en service d’une installation de production d’électricité

ET AUSSI

Publication de la réponse de la CRE à la consultation de la Direction générale de l’énergie et du climat (DGEC) sur le soutien public aux stations de transfert d’énergie par pompage (STEP)

[Actualités d'avril 2024]

 

Pour consulter la veille juridique : déroulez cette page ou téléchargez la veille en version .pdf (PDF - 391 Ko)


 

LES TEXTES

Loi

Loi du 11 avril 2024 visant à protéger le groupe Electricité de France d’un démembrement 

La loi du 11 avril 2024 prévoit en son article premier que l’entreprise dénommée « Electricité de France » est une société anonyme d’intérêt national dont le capital est détenu à 100 % par l’Etat. Par ailleurs, EDF conclut avec l’Etat un contrat d’une durée de dix ans, actualisé tous les trois ans. Ce contrat détermine les objectifs en matière de trajectoire financière, d’investissement, de décarbonation de la production, de maitrise des prix et d’adaptation des capacités de production à l’évolution de la demande d’électricité. A cet effet, le rapport annuel d’EDF rend compte de la mise en œuvre de ce contrat. Ce rapport est adressé au Parlement et à la CRE. Enfin, la part de détention du capital par l’Etat peut être minorée par la détention de parts par les salariés et les anciens salariés du groupe. Une limite sera fixée par décret. 

Dans un deuxième article, la loi prévoit une extension, à compter du 1er février 2025, de l’éligibilité des TRVE pour les consommateurs finals domestiques et non domestiques qui emploient moins de 10 personnes et dont le chiffres d’affaires, les recettes ou le total de bilan annuels n’excèdent 2 millions d’euros (TPE et petites collectivités territoriales), souscrivant une puissance supérieure à 36 kilovoltampères. 

Dans un troisième et dernier article, la loi prévoit la remise d’un rapport dans un délai de 6 mois au Parlement sur l’intérêt de nationaliser la société Electricité de Mayotte dont EDF est actionnaire minoritaire. 

Loi du 22 avril 2024 portant diverses dispositions d'adaptation au droit de l'Union européenne en matière d'économie, de finances, de transition écologique, de droit pénal, de droit social et en matière agricole

Par la loi du 22 avril 2024, le législateur transpose la définition de l’hydrogène renouvelable ou bas-carbone, en complétant ainsi l’article L. 811-1 du code de l’énergie : « Pour bénéficier de la qualification de renouvelable ou de bas-carbone, l’hydrogène respecte également, lors de son utilisation, le seuil d’émissions […], en tenant compte des émissions associées à la fourniture des intrants, à la transformation, au transport, à la distribution, à la combustion lors de l’utilisation finale ainsi qu’au captage et au stockage géologique du carbone ».

Décrets 

Décret relatif au développement de l'agrivoltaïsme et aux conditions d'implantation des installations photovoltaïques sur des terrains agricoles, naturels ou forestiers

Le décret du 8 avril 2024 précise les conditions de mise en place des projets agrivoltaïques et photovoltaïque au sol sur terrains naturels, agricoles et forestiers.

En application de l’article L. 314-36 du code de l’énergie qui définit les installations agrivoltaïques, le décret explicite les conditions relatives au caractère agricole des parcelles, aux exploitants ainsi qu’aux services apportés par l’installation. Il indique les conditions relatives à la production agricole et au revenu issu de cette production, ainsi que les conditions nécessaires pour garantir que l’activité agricole reste principale. 

Le décret comprend également des dispositions relatives aux installations photovoltaïques compatibles avec l’exercice d’une activité agricole ainsi que les modalités de contrôle et de sanctions le cas échéant. 

Principales délibérations de la CRE

Délibération portant communication relative à la publication des coûts marginaux prévisionnels de production d’électricité dans les zones non interconnectées aux horizons 2028 et 2038

Par deux délibérations des 10 juin 2015 et 2 février 2017, la CRE avait précisé les méthodologies d’analyse adoptées pour la prise en charge, au titre des charges imputables au service public de l’énergie (SPE) dans les zones non interconnectées (ZNI), des coûts de maîtrise de la demande en énergie (MDE) dans les projets d’infrastructures de MDE et les projets de petites actions de MDE. Ces méthodologiques précisent notamment les modalités de calcul des surcoûts de production évités.

La délibération du 28 mars 2024, publiée le 15 avril, a pour objet de rendre publics les coûts marginaux de production pour l’ensemble des ZNI pour les années de référence 2028 et 2038, en explicitant la méthode et les principales hypothèses utilisées pour le calcul.

Les coûts marginaux pour la Corse, la Guadeloupe, la Guyane, la Martinique, Mayotte et la Réunion sont présentés à l’Annexe 1 et ceux pour Wallis-et-Futuna, Saint-Pierre et Miquelon, les îles du Ponant, Saint-Martin et Saint-Barthélemy à l’Annexe 2.

Délibération portant communication de l’avancement des projets bénéficiant de dérogations accordées dans le cadre du dispositif d’expérimentation réglementaire

Par une délibération du 28 mars 2024, publiée le 18 avril, la CRE dresse l’état d’avancement à date des 29 projets bénéficiant du dispositif d’expérimentation réglementaire, dit « bac à sable réglementaire », permettant d’accorder des dérogations aux conditions d’accès et à l’utilisation des réseaux et installations pour déployer à titre expérimental des technologies ou services innovants en faveur de la transition énergétique et des réseaux et infrastructures intelligents (cf. L’Energie du droit, n°23, novembre 2019).

La CRE indique que les travaux nécessaires pour le lancement de 9 expérimentations ont débuté, une expérimentation est en cours et a produit des indicateurs, une expérimentation a été suspendue par le porteur de projet (pour des raisons d’équilibre financier), 15 sont désormais réalisables à droit constant et ne relèvent plus de ce dispositif règlementaire, 2 sont terminées et une a été abandonnée.

La CRE constate un avancement général « satisfaisant » des expérimentions, et se réjouit de l’implication des gestionnaires de réseaux mais elle relève que les délais induits par l’obtention d’autorisations (environnementales, travaux) causent des retards significatifs et limitent la vocation du dispositif réglementaire à faciliter la mise en place de solutions innovantes. 

Délibération portant validation des zonages de raccordement dans le cadre de l’insertion des gaz renouvelables ou bas-carbone dans les réseaux de gaz

Par une délibération du 4 avril 2024, la CRE valide la révision de 4 projets de zonages de raccordement qui s’ajoutent aux 351 zonages déjà validés.

La CRE précise que les zonages de raccordement sont désormais prescriptifs, c’est-à-dire que tout raccordement d’un site d’injection de gaz renouvelable ou bas carbone doit être conforme à ceux-ci.

Ces zonages de raccordement devront faire l’objet d’une révision par les opérateurs et d’une nouvelle consultation des acteurs locaux au plus tard en février 2026.

Délibération portant approbation des règles services système tension

RTE a soumis le 20 mars 2024, à l’approbation de la CRE, sa proposition d’évolution des règles services système tension. 

Par une délibération du 16 avril 2024, la CRE approuve ces évolutions, qui permettent la participation de nouveaux acteurs aux services système tension.

Elle demande en outre à RTE :

- de démarrer, avant la fin d’année 2024, une concertation plus approfondie sur les règles services système tension, notamment au sujet des services fournis par les participants et des conditions de rémunérations de ces services, et

- de saisir la CRE pour approbation d’une proposition d’évolution en profondeur de l’ensemble des règles services système tension d’ici la fin du deuxième trimestre de l’année 2025.

LE JUGE

Cour européenne des droits de l'homme (CourEDH)

Reconnaissance du droit des individus d’être protégés par l’Etat contre les effets néfastes graves du changement climatique sur leur vie

Dans un arrêt rendu en grande chambre le 9 avril 2024, la CourEDH a condamné, pour la première fois en matière de carence de l’État dans l’action contre les effets du changement climatique, un État pour violation des articles 6 (droit à un procès équitable) et 8 (droit au respect de la vie privée et familiale) de la Convention européenne des droits de l'homme (CEDH).

Saisie à l’origine de trois requêtes, les requêtes intentées contre la France et le Portugal ont été déclarées irrecevables par la CourEDH. Concernant la requête déposée à l’encontre du Portugal, la CourEDH a jugé que les voies de recours internes au Portugal n'étaient pas épuisées. Dans l’affaire intentée à l’encontre de la France, elle a jugé que le requérant, ancien résident et maire de la commune de Grande-Synthe, ne justifiait d'aucun lien pertinent avec cette commune et que, de surcroît, ne résidant pas en France actuellement, il ne pouvait pas prétendre à la qualité de victime au sens de l'article 34 CEDH. Seule une association à but non lucratif suisse, qui dénonçait des « manquements des autorités suisses » pour atténuer les effets du changement climatique, a pu agir au nom de ses membres contre la Suisse.

La CourEDH a condamné l'État suisse pour violation du droit au respect de la vie privée et familiale (article 8 CEDH) en ce qu’il consacre « un droit pour les individus à une protection effective, par les autorités de l'État, contre les effets néfastes graves du changement climatique sur leur vie, leur santé, leur bien-être et leur qualité de vie ». 

Elle constate par ailleurs la violation du droit à un procès équitable (article 6 CEDH) en ce que « les juridictions suisses n’ont pas expliqué de façon convaincante pourquoi elles ont estimé qu’il n’y avait pas lieu d’examiner le bien-fondé des griefs de l’association requérante ».

Conseil d’Etat

Validation du régime visant à réduire les délais de jugement applicables au contentieux de certaines installations de production d’énergie renouvelable

La Conférence des bâtonniers de France (CBF) et la Fédération nationale des unions de jeunes avocats (FNUJA) ont demandé au Conseil d'Etat d'annuler pour excès de pouvoir le décret n°2022-1379 du 29 octobre 2022 relatif au régime juridique applicable au contentieux des décisions afférentes aux installations de production d'énergie à partir de sources renouvelables.

L'article 1er de ce décret a créé au sein du code de justice administrative (CJA) un nouvel article R. 311-6 qui aménage le régime contentieux applicable aux litiges portant sur certaines décisions, prises entre le 1er novembre 2022 et le 31 décembre 2026, relatives aux installations de production d’énergie renouvelables listées. En particulier, l’article R. 311-6, III du CJA fixe, pour ces litiges, un délai de jugement de 10 mois à peine de dessaisissement au profit de la juridiction de degré supérieur (cour administrative d’appel ou Conseil d’Etat). 

Sur les moyens de légalité interne, le Conseil d’Etat estime que cette procédure, temporairement prévue, n’a pas, en tant que telle, pour objet ou pour effet de supprimer un degré de juridiction, en ce qu’elle se borne à aménager les délais de jugement sans priver les justiciables de l'accès à un juge, et ne méconnait pas le principe d'égalité entre les justiciables. Il considère également que les requérantes ne peuvent utilement invoquer le principe de non-régression en matière environnementale, selon lequel la protection de l'environnement ne peut faire l'objet que d'une amélioration constante, pour contester ces dispositions. Enfin, il affirme qu’il ne ressort pas des pièces du dossier que ce décret serait entaché d'erreur manifeste d'appréciation.

Dès lors, le Conseil d’Etat conclut que la CBF et la FNUJA ne sont pas fondées à demander l'annulation pour excès de pouvoir du décret du 29 octobre 2022.

Juge compétent pour connaître du contentieux des décisions relatives aux installations de production d'énergie renouvelable en mer

Par une décision du 30 avril 2024, le Conseil d'Etat s’est dit compétent pour connaître en premier et dernier ressort d'un litige relatif au refus du préfet de mettre en œuvre les pouvoirs qu'il tient de l'article L. 171-7 du code de l'environnement, en mettant en demeure l'exploitant d'un parc éolien en mer de régulariser sa situation par le dépôt de la demande de « dérogations espèces protégées » requise au titre de l'article L. 411-2 du code de l'environnement dans un délai déterminé et, le cas échéant, en édictant des mesures conservatoires jusqu'à ce qu'il ait été statué sur cette demande.

L'EUROPE

Commission européenne

Rapport 2023 de la Commission européenne sur les aides d’Etat

La Commission européenne a publié le 9 avril 2024 son rapport 2023 sur les aides d’Etat. Sur un total de 228 milliards d’euros d’aides d’Etat versés par les Etats membres, 41,51 milliards d’euros ont concerné l’énergie et l’environnement. L’Allemagne est l’Etat membre ayant versé le plus d’aides d’Etat tous secteurs confondus avec un total de 73,67 milliards d’euros, soit 32 % des dépenses d’aides d’Etat en Union européenne, notamment pour éviter la faillite de grands groupes industriels. La France a quant à elle versé 44,79 milliards d’euros.

Aides d’Etat : résumé des décisions d’avril 2024

La Commission européenne a rendu trois décisions approuvant des régimes d’aides d’Etat destinés à soutenir le développement des énergies renouvelables, au mois d’avril 2024 :

  • autorisation d’un régime grec d’un montant de 1 milliard d’euros visant à soutenir des projets de production et de stockage d’énergie renouvelable (1er avril 2024, SA.103399) : la mesure vise à soutenir deux projets de production et de stockage d’énergie renouvelable, i) le projet Faethon prévoyant la construction de deux unités photovoltaïques chacune d’une capacité de 252 MW ainsi que d’unités intégrées de stockage thermique à sels fondus et d’une sous-station à très haute tension et ii) le projet Seli prévoyant la construction d’une unité photovoltaïque de 309 MW avec un système intégré de stockage d’énergie par batterie lithium-ion. L’aide prend la forme d’un contrat d’écart compensatoire bidirectionnel et les deux constructions devraient voir le jour d’ici mi-2025 ;

  • autorisation d’un régime allemand de 350 millions d’euros visant à soutenir la production d’hydrogène renouvelable (4 avril 2024, SA.109550) : le régime vise à soutenir la production d’hydrogène renouvelable au moyen du système d’enchères en tant que service (« Auctions-as-a-Service ») de la Banque européenne de l’hydrogène, afin de réduire les importations de combustibles fossiles russes et d’accélérer la transition écologique. L’aide permettra le développement d’une capacité d’électrolyse pouvant atteindre 90 MW et encouragera la production d’un maximum de 75 000 tonnes d’hydrogène renouvelable. L’aide sera octroyée dans le cadre d’une procédure de mise en concurrence supervisée par l’Agence exécutive européenne pour le climat, les infrastructures et l’environnement (CINEA) ;

  • autorisation d’un régime allemand de 2,2 milliards d’euros visant à soutenir la décarbonation des processus industriels afin de favoriser la transition vers une économie à zéro émission nette (9 avril 2024, SA.108729) : le régime est autorisé sur le fondement de l’encadrement temporaire de crise en matière d’aides d’Etat adopté par la Commission européenne le 23 mars 2022 et modifié le 9 mars 2023 (cf. L’Energie du droit n°61, mars 2023) et vise à soutenir i) les investissements dans l’électrification des processus industriels ainsi que ii) les investissements permettant le remplacement des combustibles fossiles par de l’hydrogène renouvelable ou des combustibles dérivés de l’hydrogène renouvelable. L’aide prendra la forme de subventions directes et sera ouverte aux entreprises utilisant des combustibles fossiles comme source d’énergie ou comme matière première pour leurs processus de production dans le secteur industriel allemand ;

  • autorisation d’un régime français de 300 millions d’euros visant à soutenir l’entreprise Nuward dans la recherche et le développement de petits réacteurs nucléaires modulaires (PRM) (25 avril 2024, SA.106964) : le projet vise à mettre au point des processus de conception et de construction de PRM sur la base d'une conception simple et modulaire et d'une puissance de sortie équivalente ou inférieure à 300 MWe. La conception préliminaire est la troisième phase du projet Nuward global, qui comprend cinq phases distinctes. L’aide prendra la forme d'une subvention directe qui couvrira le projet jusqu'au début de l'année 2027. 

Ces décisions de la Commission européenne n’ont pas encore été rendues publiques et seront consultables ultérieurement dans le registre des aides d’Etat.

Publication de la révision du Règlement REMIT au Journal officiel de l’Union européenne

La révision du Règlement n°1227/2011 du 25 octobre 2011 concernant l'intégrité et la transparence du marché de gros de l'énergie, dit règlement « REMIT », approuvé par les Etats membres au Conseil de l’Union européenne le 18 mars 2024 (cf. L’Energie du droit n°72, mars 2025) a été publiée au Journal officiel de l’Union européenne le 17 avril 2024. Elle entrera en vigueur le 7 mai 2024.

En parallèle, l’Agence européenne de coopération des régulateurs de l’énergie (ACER) a répondu, dans une lettre ouverte publiée le même jour, à plusieurs questions des parties prenantes pour les aider à se conformer à leurs obligations de suivi.

Parlement européen

Adoption formelle du Règlement relatif aux fuites de méthane

Le 10 avril 2024, le Parlement européen a adopté en séance plénière le projet de Règlement concernant la réduction des émissions de méthane dans le secteur de l’énergie avec 530 voix pour, 63 contre et 28 abstentions. Ce texte avait déjà obtenu l’accord provisoire en trilogue du Conseil de l’Union européenne et du Parlement européen le 15 novembre 2023 (cf. L’Energie du droit n°68, novembre 2023).

Pour rappel, ce règlement vise à introduire de nouvelles exigences pour les secteurs du pétrole, du gaz et du charbon concernant la mesure, la déclaration et la vérification des émissions de méthane. Ce texte établit également des mesures d’atténuation de ces émissions ainsi que des outils de surveillance pour assurer la transparence des émissions de méthane liées aux importations en Europe. Les deux institutions sont parvenues à un accord sur :

Adoption formelle de la réforme de l’organisation du marché de l’électricité 

Le 11 avril 2024, le Parlement européen a adopté en séance plénière la réforme de l’organisation du marché de l’électricité. Le projet de Règlement, révisant le Règlement (UE) 2019/943, a obtenu 433 voix pour, 140 contre et 15 abstentions et le projet de Directive, révisant la Directive (UE) 2019/944, a obtenu 473 voix pour, 80 contre et 27 abstentions. Ces textes avaient déjà obtenu l’accord provisoire en trilogue du Conseil de l’Union européenne et du Parlement européen le 14 décembre 2023 (cf. L’Energie du droit n°69, décembre 2023).

Pour rappel, cette réforme, présentée par la Commission européenne le 14 mars 2023 (cf. L’Energie du droit n°61, mars 2023) vise notamment à rendre les prix de l'électricité moins dépendants de la volatilité des prix des combustibles fossiles, à protéger les consommateurs contre les flambées des prix, à accélérer le déploiement des énergies renouvelables et à améliorer la protection des consommateurs.

Adoption formelle de la réforme du marché européen de l’hydrogène et du gaz

Le 11 avril 2024, le Parlement européen a adopté en séance plénière le « Paquet gaz » visant à réformer le marché européen de l’hydrogène et du gaz. Le projet de Règlement, révisant notamment les Règlements (UE) 2019/942 et (CE) n°715/2009, a obtenu 447 voix pour, 90 contre et 54 abstentions et le projet de Directive, révisant notamment la Directive 2009/73/CE, a obtenu 425 voix pour, 64 contre et 100 abstentions. Ces textes avaient déjà obtenu l’accord provisoire en trilogue du Conseil de l’Union européenne et du Parlement européen le 8 décembre 2023 pour le Règlement et le 21 décembre 2023 pour la Directive (cf. L’Energie du droit n°69, décembre 2023).

Pour rappel, l’objectif du Règlement est de favoriser le développement des gaz renouvelables dans le système énergétique, en particulier l’hydrogène et le biométhane. La Directive encadre quant à elle les règles communes pour le marché intérieur du gaz naturel et introduit de nouvelles dispositions relatives à l’hydrogène.

Agence de Coopération des Régulateurs de l’Energie (ACER)

Avis sur les développements nécessaires pour satisfaire aux exigences minimales de capacité entre zones

Dans un avis en date du 10 avril 2024, adressé au Parlement européen et à la Commission européenne, l’ACER souligne l'urgence, pour les gestionnaires de réseau de transport (GRT), de respecter leur obligation de rendre 70 % de la capacité de transport disponible pour les échanges transfrontaliers d'électricité d'ici fin 2025.

Selon l’ACER, maximiser la capacité d’interconnexion en atteignant l’exigence minimale de 70 % :

  • est un préalable à la transition énergétique ;

  • améliore la sécurité d'approvisionnement en électricité en optimisant l'utilisation du réseau existant ;

  • atténue les prix et leur volatilité ;

  • offre au marché de la flexibilité ; 

  • garantit des conditions de concurrence équitables entre les échanges nationaux et transfrontaliers.

L’ACER appelle à la mise en œuvre rapide par les GRT des trois outils prévus par les textes européens pour atteindre l'exigence minimale de 70 % :

  • mener des actions coordonnées pour soulager la congestion du réseau ;

  • entreprendre des développements ciblés du réseau ;

  • achever le processus de révision des zones de dépôt des offres.

Consultation publique concernant la révision du code de réseau relatif aux mécanismes d'allocation des capacités gazières

L'ACER a annoncé le 17 avril 2024 le lancement d’une consultation publique, du 8 mai au 14 juin 2024, visant à recueillir les propositions des parties prenantes concernant la révision du code de réseau relatif aux mécanismes d’allocation de capacités gazières (Règlement (UE) 2017/459 de la Commission du 16 mars 2017).

L'ACER prépare à ce titre un document d'orientation sur cette révision qui se concentrera sur les améliorations du code de réseau.

Après avoir examiné les contributions des parties prenantes, d'ici fin 2024, l'ACER rédigera une recommandation à l'intention de la Commission sur la modification du code de réseau.

LA REGULATION

Comité de Règlement des Différends et des Sanctions (CoRDiS)

Différend relatif aux conditions de mise en service d’une installation de production d’électricité

Le CoRDiS s’est prononcé, par une décision du 27 mars 2024 publiée au Journal officiel de la République française du 6 avril 2024, sur une demande de règlement de différend présentée par la société d’exploitation éolienne Angrie (SEE Angrie) à l’encontre de la société Enedis concernant les conditions de mise en service d’une installation de production d’électricité.

La SEE Angrie a conclu avec la société Enedis un contrat d’accès au réseau de distribution d’électricité (CARD-I) ainsi qu’une convention de raccordement pour les besoins de son installation de production d’électricité devant être composée de cinq éoliennes. Des essais du Dispositif d’Echange d’Informations d’Exploitation (DEIE) ont été réalisés et, à la date des premières injections par la SEE Angrie, seule la construction de quatre éoliennes était achevée.

La société Enedis a refusé de constater la prise d’effet du contrat CARD-I à la date à laquelle ces quatre éoliennes ont commencé à injecter leur production sur le réseau, l’installation de production ne correspondant pas à ce qui avait été renseigné dans le formulaire de collecte d’informations rempli lors de la demande de raccordement et stipulé dans la convention de raccordement. La SEE Angrie a alors saisi le CoRDiS d’une demande de règlement de différend en considérant que les termes du contrat CARD-I n’imposent aucunement que la construction de l’entièreté de l’installation de production soit achevée pour que cette dernière soit mise en service.

Le comité relève qu’aux termes du contrat CARD-I et des stipulations de la convention de raccordement, qui forment un ensemble contractuel, la mise en service de l’installation de production ne peut s’entendre que comme la mise en service de l’ensemble des unités de production prévues par la documentation contractuelle. La société Enedis a, par ailleurs, indiqué à plusieurs reprises à la SEE Angrie que la mise en service de son installation de production nécessitait l’achèvement de la construction des cinq éoliennes. La SEE Angrie ne saurait également invoquer la possibilité d’une mise en service par tranches sans que celle-ci ne soit prévue par les stipulations contractuelles. 

Aucune stipulation contractuelle liant la SEE Angrie à Enedis et aucun principe ni aucune règle en vigueur ne permet de considérer que la réalisation des essais DEIE entraînait de facto la prise d’effet du contrat CARD-I.

Le CoRDiS rejette ainsi les demandes de la SEE Angrie.

Office of Gas and Electricity Markets (OFGEM) 

Sanction de 1,5 million de livres sterling d’un fournisseur d’électricité pour surfacturation de ses clients

Entre 2015 et 2023, ScottishPower Energy Retail Ltd (ScottishPower) a facturé par erreur 1 699 clients en prélèvement automatique à un taux plus élevé, qui ne devait s’appliquer qu’aux clients payant à la réception de la facture. 

Après s’être signalé auprès de l’autorité de régulation, ScottishPower doit rembourser 500 000 livres sterling aux clients et verser 1 million de livres sterling au fonds de réparation volontaire de l’industrie de l’énergie de l’OFGEM (approximation totale : 1,7 million d’euros).

Netherlands Authority for Consumers and Markets (ACM) 

Amende de 1,1 million d’euros pour un fournisseur d’énergie pour avoir induit en erreur les consommateurs lors d’appels de télémarketing

Hollandse Energie Maatschappij (HEM) proposait des contrats de fourniture d’énergie à un prix bien plus élevé que le prix plafond. Ces contrats fixes onéreux étaient proposés aux clients qui perdaient par conséquent leurs contrats existants, souvent plus économiques. Les vendeurs n'étaient pas clairs sur les conditions et les tarifs des contrats et usaient de techniques de vente trompeuses et souvent agressives. En conséquence, les clients ne se rendaient compte que plus tard qu'ils avaient été transférés vers un contrat plus onéreux avec HEM sous de faux prétextes. Les clients qui souhaitaient quitter HEM étaient souvent confrontés à des frais élevés de résiliation anticipée.

A la suite de nombreuses plaintes concernant les pratiques télémarketing de HEM déposées auprès de l’Autorité pour les consommateurs et les marchés néerlandaise (ACM), celle-ci a pu qualifier les actions des vendeurs au téléphone de pratique commerciale agressive. 

Ainsi, l’ACM impose une amende de 1,1 million d’euros au fournisseur d’énergie HEM. L’ACM fixe également des tarifs rétroactifs plus bas qui s’appliqueront à tous les clients ayant souscrit des contrats fixes en 2023 jusqu’au 29 avril 2024 et permet aux clients de changer de fournisseur sans surcoût. 

ET AUSSI

Publication de la réponse de la CRE à la consultation de la Direction générale de l’énergie et du climat (DGEC) sur le soutien public aux stations de transfert d’énergie par pompage (STEP)

La DGEC a lancé, en mars 2023, une consultation publique portant sur l’opportunité d’octroyer un soutien public aux installations de STEP situées en métropole continentale, ainsi que sur la forme et les modalités qu’il pourrait revêtir, afin de favoriser leur développement. La DGEC a publié le 11 avril 2024 les réponses publiques à cette consultation ainsi que leur synthèse.

La CRE estime qu’un soutien public pourrait être adapté pour permettre le développement de ces actifs à hauteur des objectifs de la PPE, notamment eu égard aux délais de développement très longs et aux montants importants des investissements initiaux. Elle considère qu’un complément de rémunération s’appuyant sur la variation de prix de marché de l’énergie n’est pas une forme de soutien adaptée et recommande de privilégier l’attribution d’une aide à l’investissement, éventuellement lissée dans le temps. 

La CRE est par ailleurs favorable à l’introduction d’un dispositif visant à contrôler ex post les risques de surcompensation pour les installations bénéficiant d’un soutien public.

Le Comité de rédaction

Alexandra BONHOMME 

Emmanuel RODRIGUEZ 

David MASLARSKI

Pauline KAHN DESCLAUX

Julie MICHEL

Claire PARGUEY

Paul VIEL

 

À lire aussi

Retour en haut de la page